Compte rendu sur la conférence de lancement du Soixantenaire de la Journée Mondiale de l’Afrique à Sciences Po Strasbourg – 20/09/22
A l’occasion du soixantenaire de l’Afrique, l’Organisation des Jeunes pour l’Union Européenne et Africaine, a eu l’honneur de recevoir dans les locaux de Sciences Po Strasbourg Monsieur Bachir EDKHIL, président de l’institut Alter Forum des Études sahariennes Al-Andalus, ainsi que Monsieur Mathias GREGOR, chercheur associé à la chaire de géopolitique de Rennes School of Business.
Les intervenants sont invités à s’exprimer et débattre sur le vaste sujet que sont les mouvements de libération et de nationalisme en Afrique, de la période coloniale aux indépendances, et plus particulièrement sur l’exemple du Mali et du Front Polisario.
Après un mot d’introduction de Monsieur Arnaud GULEC, Président du Bureau de Strasbourg de l’Organisation des Jeunes pour l’Union Européenne et Africaine, afin remercier de sa présence son Excellence M. le Consul Général du Maroc et rappeler les dates des rencontre Europe-Afrique en octobre prochain, le Président Gabriel MVOGO fait un retour sur les actions passées de l’Organisation. Le cinquantenaire étant passé trop inaperçu, il fait part de sa volonté de faire de ce soixantenaire une priorité et un jalon dans les relations Europe-Afrique. Il rappelle également l’importance de la mobilisation pour ce projet, dans le cadre de l’engagement de la jeunesse et du projet social, politique et économique que doit être l’Afrique de demain.
Monsieur Arnaud GULEC accueil ensuite Monsieur Jules NYOBE, doctorant de l’université de Strasbourg qui endosse pour cette conférence le rôle de modérateur. Il remercie les orateurs puis donne la parole à M. GREGOR.
Intervention de Monsieur Gregor.
Lors de sa présentation, Monsieur GREGOR choisit de resserrer son échelle d’analyse, partant d’abord des enjeux qui traversent l’entièreté de l’Afrique Occidentale Française pour ensuite se concentrer sur le cas du Mali et des populations Touareg, couvrant ainsi toute la chronologie du XX° siècle. Il débute son propos en argumentant l’importance de l’introduction du suffrage universel qui a pour conséquence directe de politiser les élites africaines, ainsi qu’en soulignant la place politique et économique centrale du Sénégal qui concentre à cette époque toutes les infrastructures stratégiques de la région. De la volonté de rester indépendant face aux puissances occidentales nait le rêve panafricaniste, porté par des projets de fédérations et le développement d’un sentiment d’appartenance communautaire.
Monsieur GREGOR poursuit sa présentation en se concentrant sur le cas spécifique du Mali, insistant ainsi sur l’importance de la présence soviétique qui fournit, autant sur les fronts politiques et économiques que sociaux et intellectuels, une aide au développement et à l’autonomisation lors des premiers pas du Mali indépendant, encore embourbé dans ses tentatives de multilatéralisme.
Enfin, Monsieur GREGOR nous rappelle la spécificité des populations Touaregs, nomades dont la pluriethnicité rend particulièrement complexe la construction d’une nation malienne les incluant. Il préconise la recherche de solutions à l’échelle locale, par des africains, sans toutefois oublier l’acceptation du multilatéralisme international.
Echanges et questions
En réponse aux questions avancées par Monsieur NYOBE et par les étudiants, Monsieur GREGOR invite à observer et étudier les mouvements indépendantistes de manière moins dichotomique et manichéenne que simplement les mouvements violents et ceux pacifiste. Il s’exprime ensuite sur l’opération Serval, en contextualisant les accusations de néocolonialisme français qu’elle a suscité. Toujours dans le cadre des questions, sur le sujet de l’intangibilité des frontières et de la souveraineté des peuples, Monsieur GREGOR se dit partisan d’une autonomisation des régions et une forte décentralisation pour prendre en compte les groupes ethniques, dispersés et nombreux.
Intervention de M. Bachil Edkhir
Monsieur NYOBE remercie chaleureusement Monsieur GREGOR puis invite Monsieur EDKHIR à faire sa présentation. Celui-ci débute par la présentation abrégée de l’histoire et la spécificité du Sahara occidental, colonisé au XIX° siècle par les Espagnols. La multiplicité des groupes ethniques, des religions et des langues rend la construction d’une nation Marocaine, au sens européen de communauté, très complexe. Il rappelle par la suite son parcours en tant qu’étudiant puis en tant que militant qui l’ont mené à s’engager politiquement et à créer le front Polisario (Frente Popular de Liberación de Saguía el Hamra y Río de Oro). Monsieur EDKHIR insiste sur le fait qu’il est impossible d’arbitrer dans la région avec un point de vue trop européen, sans chercher à comprendre les enjeux en se déplaçant dur le terrain.
Monsieur EDKHIR conclue en réaffirmant sa volonté de trouver une solution pacifique et rejoint Monsieur GREGOR quant à l’origine locale de ces solutions ainsi que la nécessité d’une autonomisation régionale.
Echanges et questions
Monsieur NYOBE s’interroge sur les actions internationales concernant le Sahara occidental et les projets de référendum. Monsieur EDKHIR note que le Conseil de Sécurité de l’ONU a constaté des lacunes de la légitimité référendaire puisqu’il n’y avait pas de corps électoral défini. C’est pour cela qu’il rappelle sa volonté de trouver une solution via le dialogue entre les communautés locales, qui serait plus pertinent et efficace aux vues de la situation géopolitique du Sahara occidental.
Monsieur NYOBE remercie Monsieur EDKHIR, les étudiants présents, et rend la parole à Monsieur Gabriel MVOGO qui introduit les évènements prévus par l’Organisation des Jeunes pour l’Union Africaine et Européenne des 12 et 13 octobres 2023, dont la thématique sera la coopération migratoire entre l’Europe et l’Afrique.