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Conférence : “Sur la route de Glasgow : fermeture de la voie verte”.

Alors que nous sommes en pleine conférence sur le climat à Glasgow, la direction des affaires européennes ainsi que toute l’OJUEA prend très à cœur la question du réchauffement climatique. Lors de la conférence de l’EYE sur la clôture du Green Track, notre envoyée spéciale Lorraine Racine a pu nous faire un compte-rendu des différents échanges sur le sujet. Nous avons donc pu observer en tant que jeunes la prise en compte par les politiques de nos inquiétudes concernant la conservation de notre environnement.


Intervenants : 

  • Anuna De Wever, Climate activist Youth for Climate
  • Mitzi Jonelle Tan, Climate justice activist, Youth Advocates for Climate Action Philippines and Fridays for Future MAPA
  • Niklas Nienass, MEP, Parlement européen
  • Rachel Stewart, Journaliste, Deutsche Welle
  • Jayathma Wickramanayake, Envoyée jeunesse auprès du Secrétariat général des Nations Unies

Depuis la journée de la terre en avril, le green track a permis aux jeunes en Europe d’échanger leurs points de vue sur l’environnement et le changement climatique. Le green track est le rapport pour voir ce que les jeunes Européens veulent voir inscrit à l’ordre jour lors de la conférence de Glasgow, du 31 octobre au 12 novembre 2021.

  • Anuna De Wever, Climate activist Youth for Climate
  • Mitzi Jonelle Tan, Climate justice activist, Youth Advocates for Climate Action Philippines and Fridays for Future MAPA
  • Niklas Nienass, MEP, Parlement européen
  • Rachel Stewart, Journaliste, Deutsche Welle
  • Jayathma Wickramanayake, Envoyée jeunesse auprès du Secrétariat général des Nations Unies
  • Heidi Hautala, Vice-présidente du PE :

    Il ne faut pas seulement insister sur la réduction des émissions. Vous avez insisté sur l’importance d’avoir un changement réel de paradigme afin de transformer les économies et sociétés pour qu’elles répondent à nos aspirations écologiques et sociales. Les priorités politiques ont changé, la société civile a de meilleures chances de faire évoluer la tendance grâce au parlement européen. Le marché ne changera pas tout : les règles communes qui gouvernent les marchés doivent être modifiées, d’autant plus que bientôt les grandes compagnies seront responsables de leur empreinte écologique et sociale. L’UE est cheffe de file d’une gouvernance durable, d’un développement durable et ce sont des éléments très importants. Nous devons insister sur l’éducation, le travail avec objectifs, la solidarité est la clef. 

    Questions pour Mitzi Jonelle Tan

    Q : On s’interroge quant à la menace du changement climatique. Comment se profile-t-il pour les Philippines ou pour les régions du sud ? 

    Mitzi Jonelle Tan : J’ai connu les typhons et j’en ai vécu les terribles conséquences : vivre à la bougie, les familles réfugiées sur un toit, etc. La question autour de cette crise climatique est aussi de savoir si nous sommes en mesure de nous adapter, de faire face à ces pertes, à ces dégâts, ainsi que le rôle de l’Europe dans ces catastrophes au Sud. 

    Lorsque nous mettons l’accent sur le changement climatique, il est important de garder à l’esprit que nous évoquons un système mis en place à l’origine de ces menaces. En 2013, le typhon Ariane a eu de telles répercussions que les jeunes filles ont été forcées de se prostituer en raison de conditions de vie déplorables pour les femmes. Il n’y avait pas d’autres formes d’emplois, ce qui a approfondi une crise de classe. Les États-Unis ont accordé des prêts, nous nous sommes endettés et avons dû financer les intérêts en conséquence des comportements des pays du Nord. Les subventions fiscales pour un certain nombre de produits ont été réduites et les communautés de pêcheurs et agriculteurs ont été durement touchées. La crise climatique est un phénomène aux conséquences multiples. Il ne s’agit pas uniquement du climat, mais d’une oppression historique. 

    Q : Dans ce contexte, ce n’est pas comme si les autres citoyens allaient apprécier ce genre de paroles. Les gouvernements, les décideurs publics n’apprécient pas tous ce genre de discours. 

    R : Les Philippines représentent pour les activistes environnementaux le 3ème pays le plus dangereux. J’ai été qualifiée de terroriste, menacée, l’armée et les journaux nationaux affirment que les jeunes filles qui se lancent dans la protection de l’environnement veulent encourager les hommes à rejoindre l’armée et à devenir terroristes. Aux Philippines, être qualifiée de terroriste représente un risque de disparition, de meurtre, ou d’arrestations arbitraires. Récemment, une personnalité indigène très connue aux Philippines, cheffe de sa tribu a été choisie par son peuple pour lutter contre les mines de charbon. L’armée et le gouvernement philippin la considèrent comme une terroriste. Ils essayent de faire pression sur elle et sa famille pour qu’elle mette fin à ses campagnes. Également dans les pays du Nord, beaucoup de législations remettent en cause la liberté d’expression des activistes environnementaux. Il faut en être conscient. Tous ceux qui sont au pouvoir craignent ces remises en question. Il est essentiel d’avoir une véritable communauté, la justice climatique est pour nous la même chose pour nous et pour vous, nous nous battons pour un monde où personne n’est mis de côté. Certains nous diront que c’est radical, mais pourquoi est-ce radical de vouloir un monde dans laquelle la justice climatique est mise en œuvre et respectée ? 

    Les principaux dirigeants de la planète à l’ouverture de la conférence sur les changements climatiques à Glasgow en Ecosse.

    Questions pour Jayathma Wickramanayake : 

    Q : Vous mettez en avant la participation des jeunes. Quels sont les défis auxquels vous avez été confrontés concernant la mobilisation des jeunes, et notamment des jeunes femmes ? 

    R : Je suis d’accord avec ce qui vient d’être dit par Mitzi. Il faudrait que nous constations les origines de cette crise : la colonisation, la surconsommation. Je remercie et salue les jeunes filles comme Mitzi, qui risquent leur vie pour se faire entendre et agissent pour que les décideurs soient rendus responsables à l’ égard des engagements nationaux ou internationaux. Des millions de jeunes ont demandé des changements systémiques, difficilement acceptés par certains gouvernements. Chili, Myanmar, Soudan, les jeunes mobilisent dans les médias, sur les réseaux sociaux. Il faut voir comment cette mobilisation est prise en compte par les personnes au pouvoir. Il y a peu de personnes pour agir lorsque les jeunes parlent, nous assistons à une grande différence entre les actions et les discours, et ce malgré les millions de jeunes mobilisés qui se préoccupent de leur avenir.

    Question : vous étiez au sommet pour le climat de Milan, quelles sont les préoccupations qui ont été évoquées par les jeunes ? 

    R : 300 jeunes partout dans le monde ont développé des propositions très concrètes : durabilité, engagement, ambition. Quelle que soit votre origine géographique ou socio-économique. Il faudrait que les jeunes disposent de ressources pour militer et continuer leurs travaux en parallèle. Ils ont insisté sur le fait qu’il faudrait une communication plus sûre sur le climat, plus tournée vers l’éducation. Si on veut atteindre les accords de Paris : il faut absolument une transition énergétique appropriée tournée vers la résilience. Les jeunes ont déclaré qu’ils ne pouvaient pas éviter de mentionner les pertes et dommages. Avec la COP 26 il important de voir ce qu’il en est des coûts d’adaptations. Beaucoup de jeunes veulent veiller à ne pas encourager par quelconque moyen l’exploitation des femmes ou le travail des enfants. Il est intéressant de constater comment en quelques jours plus de 300 jeunes arrivent à trouver un consensus alors que les négociations entre chefs d’État mettent des mois et des mois à aboutir. 

    Questions à Anuna 

    Q : Vous avez pris la parole au conseil de l’Europe. Quels sont les éléments les plus importants qui ont été discutés et êtes-vous écoutée ? 

    R : Les leaders ne nous écoutent pas. Il faut que nous nous battions pour insister sur le fait que nous avons notre place. Nous allons hériter de la planète et des décisions qui seront prises aujourd’hui. Tout le monde est d’accord pour dire que nous ne faisons pas assez en matière de Green Deal européen. On parle de la PAC, nous avons le Mercosur qui va à l’encontre des promesses qui ont été faites lors de discours ambitieux. Il y a également un manque de cohérence. Plusieurs d’entre nous avons déjà entendu des représentants politiques, mais nous savons que d’autres promesses sont faites et qui contredisent les ambitions promises avec nous. Nous sommes encore très loin des accords de Paris, on ne tient pas compte suffisamment des préoccupations : si on veut que nos leaders prennent les choses sérieusement, il faut constater cette crise climatique. De nombreux leaders minimisent la crise ce qui est pire, car il est plus facile pour les gens de continuer à travailler. Nous risquons une augmentation de la température de 3 à 4 degrés en moyenne. 

    Q : Qu’est-ce qui empêche les hommes et femmes politiques de prendre cette crise climatique au sérieux ? 

    R : Maintenant que les jeunes se mobilisent de plus en plus dénonçant un système obsolète, et c’est très compliqué pour une grande majorité de décideurs publics de renier les systèmes traditionnels qu’ils connaissent et dans lesquels ils évoluent. Il y a un manque de véritable volonté politique. C’est pour cette raison qu’il est très important que les jeunes continuent à faire pression, nous avons du pouvoir et nous pouvons le mettre en avant !

    Lors de la COP26, Ursula von der Leyen a incarné l’investissement de l’Union européenne dans une série d’accords en faveur de la protection du climat

    Questions à Niklas 

    Q : Quels sont les éléments les plus importants qui doivent être pris en compte par les hommes et femmes politiques en Europe ? 

    R : Il faut s’engager à aller dans le sens de ce qu’ils ont promis. Dans le Green deal proposé par la commission la PAC reste inchangée, celui-ci ne peut donc pas permettre réellement d’atteindre un objectif d’ici 2050. Les conservateurs et socio-démocrates se sont rendu compte qu’il était possible qu’ils ne soient pas réélus, car de milliers de jeunes Européens se sont mobilisés dans les rues. C’est la première fois qu’il n’y a pas eu de grande majorité pour les grands groupes, ils ont perdu beaucoup de voix et se sont rendu compte qu’il fallait qu’ils agissent s’ils ne voulaient pas perdre les futures élections. Il faut que les hommes politiques craignent de ne pas être réélus. Nous avons eu des demandes par le passé, nous devons avoir davantage d’actions et de visibilité dans les rues. 

    Q : Vous avez des personnes qui sont descendues dans les rues, mais ne peuvent pas voter pour la plupart d’entre eux. Quel est le poids de ceci pour la politique ? 

    R : Les jeunes qui vont devoir vivre le plus longtemps avec les décisions prises aujourd’hui sont en incapacité de voter, pour autant, la politique ne consiste pas seulement à voter, être élu ou être membre du Parlement. Il faut que le ressenti soit important pour tous, d’abord dans la sphère privée. 

    QUESTIONS/RÉPONSES AVEC LE PUBLIC 

    Q : Nous sommes tous d’accord sur la barre à ne pas dépasser. Concernant le changement climatique. Qu’espérons-nous atteindre à Glasgow ? 

    R : Nous souhaitons des décideurs politiques très différents : des décideurs qui doivent consulter la jeunesse, les groupes d’actions, les personnalités politiques du Nord doivent entamer un dialogue avec les pays du Sud. C’est la même chose que pour la répartition inégale des vaccins, beaucoup de militants du Sud ne pourront pas participer à la COP 26 alors que ce sont eux qui doivent être entendus. J’en appelle à faire en sorte que ces voix se fassent entendre par le biais de ceux présents. Essayez de trouver de réelles solutions pour ne pas aller jusqu’à une COP30.

    Q : Par rapport à l’inclusion de la jeunesse, comment pouvons-nous nous assurer qu’un échange direct depuis l’hémicycle soit possible et récurrent, grâce à un financement (frais de logement, déplacements…). Comment les jeunes peuvent obtenir une place plus proéminente de manière institutionnalisée ? 

    R : Les jeunes sont sous-représentés, car non éligibles, occupés par leur emploi ou en études, et donc leur vision est exclue de toute discussion. Nous avons proposé une chambre séparée. Rien ne se passe concrètement après ce qui est décidé au sein du parlement européen de la jeunesse, ce qui détruit la démocratie européenne. Des comités de la jeunesse, où les jeunes peuvent poser des questions aux parlementaires, rédiger des avis, avec le comité des régions ainsi que le comité économique et social existent, mais ne sont pas vraiment valorisés. Le seul lieu où c’est possible est celui de la conférence sur l’avenir de l’Europe. C’est important d’avoir des espaces clairement définis dans les négociations elles-mêmes. Par exemple, Youngo est une circonscription onusienne de jeunes qui s’est organisée pour participer aux négociations.

    Q : Les jeunes mettent la pression, le Parlement a vu un changement vers plus de mobilisations durant les dernières élections et dernièrement les décisions au niveau européen comme la réforme de la PAC n’incluent pas les jeunes. Pensez-vous que la configuration actuelle peut fournir des résultats sur la transformation dont nous avons besoin ? 

    R : Si on a une instance institutionnelle qui, par une minorité peut bloquer une majorité, ce sera toujours plus difficile de concrétiser un changement. Sur le plan institutionnel, le Conseil est à l’arrêt. Le compromis semble le maître mot et les jeunes ne semblent pas s’en satisfaire.

    Q : Pensez-vous vraiment que vos actions ont des conséquences ? 

    R : Toutes les actions comptent à condition que l’activisme mette l’accent sur les communautés, plus un désir de changement de mentalité : abolir les systèmes traditionnels. 

    Q : Comment vous envisagez le Green Deal européen ? On sait que cette notion d’une Europe à deux vitesses est de plus en plus présente : qu’est-ce qu’en pensent les militants climatiques ? Quelles sont les incidences sur la collaboration, les objectifs ?

    R : Pour les pays nationaux, le droit européen et d’autres programmes peuvent être contraignants. Au sein d’une commission, un soutien envers les régions minières est envisagé, à condition que les régions acceptent d’arrêter la production de charbon d’ici 2040. C’est tard, mais nous avons essayé de veiller à ce que la Pologne évolue en ce sens. Ces pays sont libres de refuser les fonds, mais généralement, ils ont tout intérêt à accepter. 

    Q : Avec l’EYE, il reste important d’avoir un regard hors Europe. Avez-vous un message pour les jeunes Européens en matière climatique ? 

    R : N’arrêtez pas, ne croyez pas les hommes politiques qui vous disent que tout se passera bien, car c’est faux. Ils sont malheureusement pour la plupart plutôt intéressés par leur fonction. La qualité d’homme politique n’établit pas la vérité. Vous avez le droit de participer, c’est seulement ainsi que nos volontés auront du sens. Croyez-en vous, vous avez le droit et le pouvoir de refuser de faire partie d’un système destructeur.

                L’OJUEA encourage tous les activistes climatiques à continuer leur combat sur le terrain tandis que nos jeunes, parfois même engagés au niveau local, continueront d’œuvrer au niveau institutionnel. C’est tous ensemble que nous pourrons réussir à faire infléchir les politiques publiques vers des dispositions plus saines pour notre environnement, notre santé et notre avenir.

                Compte-rendu rédigé par Lorraine Racine, chargée de la coopération avec le Parlement européen, sous la direction de Benjamin Toussaint, directeur des affaires européennes de l’OJUEA.