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INTERVENTION DE M. GABRIEL MVOGO, PRESIDENT DE L’ORGANISATION DES JEUNES POUR L’UNION EUROPEENNE ET AFRICAINE.

POLITICAL FESTIVAL OF EUROPE – MARIAGER, DANEMARK 2022

Comment l’Europe peut-elle être une actrice plus importante, lorsqu’il s’agit d’assurer un
développement durable en Afrique ?

Intervenants :

  • Monsieur Flemming Moller Mortensen , Ministre danois de la Coopération au Développement
    et Ministre de la Coopération nordique.
  • Monsieur Gabriel MVOGO, Président de l’Organisation des Jeunes pour l’Union Européenne
    et Africaine – OJUEA.
PROPOS PRELIMINAIRE DE MONSIEUR GABRIEL MVOGO, PRESIDENT DE L’ORGANISATION DES JEUNES POUR L’UNION EUROPEENNE ET AFRICAINE. – POLITICAL FESTIVAL OF EUROPE – MARIAGER, DANEMARK 2022

Avant tout propos, je tiens à remercier toute l’équipe d’organisation du Political Festival of Europe, en particulier son président Monsieur Jan Bertelsen, pour cette chaleureuse invitation qu’il nous a adresser, nous, l’Organisation des jeunes pour l’Union Européenne et Africaine. Je profite de cette occasion pour adresser nos salutations à Son Excellence Monsieur le Ministre Flemming Moller Mortensen. Pour mon propos sur la thématique de ce jour, il est important de dire que la notion de « développement » diffère selon les pays et les besoins d’une population. Cependant, quand il s’agit de parler du Développement Durable, là on s’arrime à une standardisation qui a été établie à l’occasion du Sommet de la
Terre à Rio, au Brésil en 1987.

A la genèse du développement durable, les experts et les gouvernements devaient anticiper les grands défis du monde de demain. Pour ce qui concerne le cas africain, plusieurs questions se sont posées et
continuent de se poser. L’une des plus importantes d’entre elles est celle de savoir comment assurer par anticipation, une vie décente à une population de 2,5 milliards d’habitants d’ici 2050.
Sous un regard international, on dirait que, géographiquement, l’Afrique a un avantage, celui d’être le voisin du continent le plus technologiquement et économiquement développé au monde. Malheureusement, il apparait que plusieurs inégalités subsistent entre les pays du nord et ceux du sud.
Du fait de ces différences de richesses de part et d’autre, l’équité européenne ne pouvant pas s’établir dans ses coopérations avec l’Afrique, il devient urgent de repenser la coopération Europe Afrique sur la base du développement durable.

Alors, comment l’Union Européenne peut-elle accompagner l’Afrique dans ses besoins en eau potable, en Santé et en Education ; Comment être à ses côtés dans la protection de la nature et la biodiversité et la lutte contre le réchauffement climatique ; Comment faire en sorte que le développement industriel, en particulier celui de l’UE, soit une source d’inspiration améliorée pour l’essor industriel du continent africain. ?

Répondre à toutes ces questions nous prendrait plus de temps qu’il ne faut pour aller à vélo de Strasbourg en France à Mariager au Danemark. Alors, je vais limiter mon propos sur le secteur de l’Agriculture, un domaine clé de l’interdépendance de la coopération UE-Afrique et qui constitue un enjeu majeur dans le socle de la solidarité sociale, environnemental et économique des ODD 30.
1- L’ENVIRONEMENT EVOLUTIF DE L’AGRICULTURE EN L’AFRIQUE
Avec sa superficie de 30 millions Km2, l’Afrique est un continent qui possède près de 15 millions de Km2 de terre arable. Elle possède une grande variété de zones agroécologiques, qui vont des forêts ombrophiles marquées par deux saisons des pluies à une végétation relativement clairsemée, sèche et aride, arrosée une fois l’an. Si cette diversité constitue un énorme atout, elle représente tout de
même un grand défi pour le développement durable agricole de l’Afrique. Selon un constat continental fait par la Banque Africaine de Développement, l’Afrique offre un immense potentiel en matière de denrées et produits agricoles susceptibles d’être produits et commercialisés sur les marchés intérieurs et
extérieurs.
Cependant, cette diversité exclut toute solution générale aux problèmes que
pose le développement agricole sur l’ensemble du continent. Par conséquent, la
programmation et la mise en oeuvre d’interventions dans ce secteur doivent être adaptées aux conditions propres à chaque zone agroécologique et à la situation socioéconomique des ménages ruraux vivant dans les différents pays du continent.
Soumis à la forte pression démographique, les ménages ruraux, premiers acteurs de l’agriculture, ont été contraints d’adopter des pratiques agricoles qui assurent leur survie. Malheureusement aujourd’hui, les stratégies de sécurité alimentaire des ménages n’accordent pas beaucoup d’importance à l’accroissement de la productivité des exploitations agricoles, du fait simplement de l’intensification du rendement par parcelle de terre cultivée. A ce tableau, l’on pourrait également ajouter la problématique du réchauffement climatique et l’avancée du désert dans la grande région du Sahel (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Egypte, Soudan, Tchad, Niger, Mali, Mauritanie). Pour ce qui est du Sahel, il faut savoir que, de l’atlantique à la mer rouge, le désert est une réalité dans la durabilité agricole de la bande sahélo saharienne de l’Afrique. Dans cette zone, malgré la sècheresse, le potentiel des terres irrigables est resté intact. Mais seul 20% de ce potentiel est utilisé et l’exode rural de la jeunesse vers les zones urbaines cède davantage la place au désert.
2- LES CHALLENGES DE L’AGRICULTURE EN AFRIQUE
En Afrique, la réalité est que le secteur agricole emploie la moitié de la population et peut créer encore plus d’emplois pour les jeunes. Dans les pays du Sahel, c’est même les trois quarts de la population qui vit de l’agriculture.
Lors de la 59ème journée mondiale de l’Afrique célébrait le 25 mai 2022, l’Union Africaine avait placé cette journée sous le thème de l’année de la nutrition, avec pour sous-thème : « bâtir une résilience en matière de sécurité nutritionnelle sur le continent africain : renforcer les systèmes agro-alimentaires et les systèmes de santé et de protection sociale pour accélérer le développement socioéconomique et du capital humain ».

Monsieur Gabriel MVOGO, Président de l’Organisation des Jeunes pour l’Union Européenne
et Africaine – OJUEA.


Malgré cette attention politique des dirigeants africains, il reste une énorme inadéquation entre le discours politique et la réalité. C’est ainsi qu’on peut constater aujourd’hui, que l’Agriculture africaine souffre de plusieurs
insuffisances dont :
1- Le manque d’investissements des capitaux publics.
2- La rétention d’information et le manque de formation d’agronome et
d’autres spécialités.
3- L’inaccessibilité aux engrais à des prix concurrentiels et le manque de
régulation.
4- L’absence de mécanisation de l’agriculture rurale.
5- Le manque de clarté foncière et cadastrale, sur la délimitation des parcelles agricoles.
6- Le manque d’infrastructures, de moyens de communication et de logistiques adéquats.
7- Le manque d’accompagnement étatique par des subventions et la vulgarisation du secteur agricole.
Le manque de protection des producteurs locaux face à la concurrence extérieure sur le marché local.
L’exode rural des jeunes vers les grandes villes ou vers une candidature à l’exil. Dans la continuité des constats des challenges de l’agriculture africaine, le Commissaire Kako Nubukpo, commissaire à l’agriculture, aux ressources en eau et à l’environnement de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) affirmait que, c’est la première fois depuis trente ans, que les pays africains allaient subir un double choc : celui de l’offre interne et celui de l’offre externe. « En Afrique de l’Ouest par exemple, aucun pays ne produit d’engrais, excepté le Nigeria, qui préfère l’exporter vers le Brésil. Or, le coût de ces intrants a connu une hausse considérable : de 80 % pour les engrais phosphorés et de 100 % pour la potasse, entre juin 2020 et mars 2022. Les paysans n’ont pas les moyens de s’en procurer à des prix aussi élevés. Et la plupart des Etats ne disposent pas des marges budgétaires suffisantes pour augmenter leurs subventions. Les conséquences sur le volume de la production locale risquent donc d’être importantes. »
A cette réalité soulevée par le Commissaire Kako Nubuko, s’ajoute les effets de la dépendance aux céréales russes et ukrainiennes, avec de nouvelles hausses des prix sur des denrées de première nécessité en milieu urbain. L’inquiétude est généralisée, mais elle ne date pas de la guerre en Ukraine, qui ne fait qu’amplifier les difficultés. La pandémie de Covid-19 avait déjà déstructuré les circuits d’approvisionnement avec pour conséquences directes, une forte inflation.


3- LES APPORTS, L’ACCOMPAGNEMENT DE L’UNION EUROPEENNE DANS LA
DURABILITE DE L’AGRICULTURE AFRICAIN.
En ce siècle nouveau, parler de l’apport européen dans le développement de l’Afrique ne se traduit plus par la notion d’aide, mais par celle de l’accompagnement avec une réciprocité d’effort pour l’atteinte des objectifs ciblés.
En son sein, l’Union Européenne se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins, d’une part, avec les aspirations des mouvements nationalistes qui, de plus en plus se rapprochent du pouvoir. D’autre part, la résurgence d’anticiper les problèmes liés à l’immigration et au changement climatique, vecteur de la
famine dans les zones touchées. Le 18 décembre 2020, la Commission européenne s’était félicitée de l’accord politique intervenu entre le Parlement européen et les États membres. Cet accord portait sur l’attribution d’une dotation de 79,5 d’euros à un nouvel Instrument de Voisinage, de Coopération au Développement et de Coopération Internationale (IVCDCI) pour la période 2021-2027.
Mais après des décennies d’aide publique au développement, cet accord d’aide nous interroge sur la situation actuelle de l’Afrique. En réalité, ce système balaie les illusions des responsables politiques qui pensent qu’il suffirait de lancer un plan Marshall pour l’Afrique comme réponse à son sous développement.
L’Europe doit reconnaître que le développement d’un pays et l’amélioration des revenus de ses habitants ne peuvent pas être suscités par l’aide publique au développement et qu’ils dépendent d’abord de la politique économique et surtout agricoles menées par le pays bénéficiaire.
Sous la pression d’une société civile africaine de plus en plus mobilisé sur les questions d’aide à l’Afrique, la Commission européenne a proposé en 2020, la redéfinition de sa stratégie en Afrique. Elle a décliné cette stratégie sur cinq piliers thématiques. Mais parmi ces points, l’agriculture n’y figurait pas. Alors, le 30 juin de la même année, le Conseil de l’UE a repris cette stratégie, en la resserrant autour de quatre thèmes qui sont :

Promotion du multilatéralisme.

Paix, sécurité et stabilité.

Développement inclusif et durable.

Croissance économique soutenable.

Tous ces objectifs doivent paraître bien lointains aux pays africains. Pour la majorité des Africains, qui sont des agriculteurs et des éleveurs, la transition verte ou le multilatéralisme ne sont pas leurs problèmes majeurs. De fait ces objectifs reflètent les préoccupations européennes et ne tiennent pas compte des réalités africaines.
4- LES SOLUTIONS EUROPEENNES
Alors, quelles sont les propositions adéquates aux réalités africaines et aux intérêts européens ?
1-Consacré près de la moitié du budget de l’aide au développement des pays africains, sur l’unique secteur de l’agriculture (mécanisation, formation et production).
2-Mettre en place des systèmes de sélections des pays sur la base d’éligibilité où une volonté publique de développement agricole est avérée sur la forme et le fond.
3-Contribuer à la construction des établissements publics d’agronomie.
4-Favoriser la formation des jeunes agriculteurs aux pratiques de l’agroécologique.
5-Diminuer considérablement le circuit de distribution des subventions envoyées par l’UE aux agriculteurs.
6-Inclure le critère d’inclusivité des petits agriculteurs dans les coopératives locales des pays africains bénéficiant d’accompagnement de l’UE.
7-Mettre en place une politique de fourniture des engins pour favoriser la mécanisation de l’agriculture auprès des populations rurales.
8-Augmenter le budget de l’Instrument de Voisinage, de Coopération au Développement et de Coopération Internationale (IVCDCI).
9-Créer des programmes agricoles incitatifs dans la bande sahélo-Sahélienne, pour favoriser à la fois la pratique de l’élevage et de l’agriculture, mais également pour lutter contre la désertification.
Au sortir de cet exposé des réalités de l’agriculture en Afrique et du rôle que peut jouer l’UE pour accompagner ce continent vers un développement durable, nous recommandons aux Etats membres de l’UE d’accentuer leur accompagnement vers des politiques agricoles. Pour nous à l’Organisation des Jeunes pour l’Union Européenne et Africaine, il faut que lors des différents Sommets UE-UA, des résolutions concrètes soient prises en faveur d’une politique éducative favorable à l’agriculture. Dans plusieurs de pays africains, le titre de paysan a été méprisé et le système scolaire a poussé les jeunes vers les métiers non agricoles, notamment de fonctionnaires. Et pourtant, Plus de la moitié des jeunes sont issus du monde rural et connaissant les techniques agricoles de leurs régions.
Le développement et l’industrialisation de l’agriculture africaine est le meilleur moyen pour le continent africain d’atteindre les objectifs à la fois des ODD 2030 des Nations Unies, mais aussi ceux de l’agenda 2063 qui a été fixé par l’Union Africaine. Avec une agriculture développée, les trois grands axes du développement durable (Social, Environnement, Economie) peuvent être efficaces pour le bien des populations du continent africain, encore appelé, le continent de l’avenir.


Je vous remercie

Photo d’amitié : M. Flemming Moller Mortensen , Ministre danois de la Coopération au Développement
et Ministre de la Coopération nordique.
M. Gabriel MVOGO, Président de l’Organisation des Jeunes pour l’Union Européenne
et Africaine – OJUEA.