L’Organisation des Jeunes pour l’Union européenne et africaine (OJUEUA) a envoyé deux délégués pour participer à la 26ème Assemblée générale annuelle d’Afreximbank, tenue à Moscou les 20 ,21 et 22 Juin 2019, en Fédération de Russie. Les assemblées annuelles de la première banque africaine d’import-export se sont tenues en prélude au premier sommet RUSSIE-AFRIQUE qui se tiendra dans la ville de Sotchi en Russie les 23 et 24 Octobre 2019. Lors de ces travaux, force a été de constater que de nombreux thèmes du meeting rejoignaient les champs de travail de notre organisation, d’où l’importance d’une représentation lors de cet événement majeur .
QUE FAIT LA BANQUE AFRICAINE IMPORT-EXPORT ?
Afreximbank, ou African Export-Import Bank, est une institution internationale de finance commerciale, créée en 1993 et dont le siège social est situé au Caire, en Egypte. Son objectif est de stimuler le développement et la diversification du commerce intra et extra-africain. Pour cela, Afreximbank dispose de trois secteurs principaux : le crédit, les assurances et garanties et les services d’information et de conseil. Afreximbank développe différents programmes, notamment le Trade Facilitation Programme, lancé en août 2018 pour répondre aux besoins des banques africaines.
Les échanges annuels organisés par la banque permettent de définir le rôle d’Afreximbank dans le processus de développement et de transformations structurelles du continent africain. Ces objectifs sont définis dans l’Agenda de l’Union Africaine de 2063. Cette 26ème assemblée générale a également pour but de préparer le Forum économique de Sotchi prévu pour octobre 2019, qui aura lieu dans le cadre du sommet Russie-Afrique. L’évènement a été organisé avec l’appui de la Fondation Roscongress, du Centre d’exportation russe (REC) et du Ministère des Finances de la Fédération de Russie.
Le meeting auquel nous avons pris part s’est déroulé sur deux jours, une réunion uniquement ouverte aux actionnaires de la banque s’étant déroulée le troisième jour.
Le thème de ces rencontres annuelles était « Harnessing Emerging Partnerships in an Era of Rising Protectionism », soit « exploiter les partenariats émergents à l’ère de la montée du protectionnisme ». L’objectif de l’assemblée générale est multi-échelles : il s’agit d’un côté de redéfinir le commerce africain, et de l’autre de créer de nouvelles opportunités dans le cadre du commerce russo-africain.
Le but de cette rencontre a d’abord été d’évaluer les opportunités et difficultés rencontrées par l’Afrique dans le cadre des dynamiques en pleine évolution du commerce et de l’investissement. En effet, le continent peine à s’imposer dans l’économie mondiale notamment à cause de son passé colonial et des ingérences étrangères dans le commerce africain. Il s’agit aussi de définir les partenariats entre l’Afrique et les puissances émergentes comme la Russie qui prennent une forme nouvelle, comme en témoigne le déclin des partenariats en lien avec l’OCDE ou l’émergence de nouvelles tendances comme l’action des banques et les partenariats commerciaux.
Jeudi 20 juin : South-South Trade as an Engine for Multilateralism
La journée, basée sur le commerce Sud-Sud, a commencé par un compte-rendu des relations entre l’Afrique et la Russie.
S’ensuit la présentation intitulée « Prospects for Multilateralism in an Era of Protectionnism », donnée par le Professeur Ha-Joon Chang de l’Université de Cambridge. Ha-Joon Chang a insisté sur le rôle de la transformation de la politique industrielle du continent, en faisant un parallèle avec le développement économique qu’a connu la Corée du Sud et que pourrait connaître l’Afrique. Il a également critiqué le fonctionnement de l’OMC qui comporte selon lui des biais défavorables aux pays en développement. Le commerce Sud-Sud s’est fortement développé dans la dernière décennie, puisqu’il représente 57% des échanges mondiaux (42% en excluant la Chine). En parallèle, la tendance des grandes puissances est au rejet du multilatéralisme. Les Etats-Unis ont amorcé une politique de préférence envers les accords bilatéraux, en renégociant, voire en se retirant des accords multilatéraux comme le TPP (Accord de partenariat transpacifique, passé avec 11 autres pays). Cette tendance a vu le jour avant l’arrivée de l’administration Trump, mais a réellement pris de l’importance à partir de 2017. Dans une moindre mesure, l’Union européenne suit une voie similaire à celle des Etats-Unis.
Au bout de ces échanges, L’assemblée en vient à un consensus sur la nécessité de l’ouverture des économies africaines au commerce pour favoriser le développement du continent.
Vendredi 21 juin : Diversification of Sources of Growth and Trade
La deuxième journée de rencontre s’est ouverte sur une présentation de Madame Vera Songwe, portant sur la diversification des sources de croissance et de commerce. Madame Vera Songwe est sous-secrétaire générale de la Commission économique pour l’Afrique (CEA). Elle est doctorante en économie mathématique, et conseillère en politiques publiques et stratégies de développement pour l’Afrique. Vera Songwe a commencé par rappeler un des obstacles majeurs au développement du continent, qui est la « commodity-dependence », c’est-à-dire la dépendance envers les matières premières. Ce constat est cependant à nuancer pour certaines régions, notamment l’Est africain qui est très diversifié.
Le problème des biens africains est principalement leur manque de diversification et de transformation. Vera Songwe se concentre ensuite sur les conséquences du traité AfCFTA(African Continental Free Trade Area) sur l’économie du continent. L’AfCFTA créera un libre marché rassemblant plus d’un milliard de personnes et représentant un PIB supérieur à 3 billions de dollars. Les négociations se concentrent particulièrement sur l’aspect paritaire de la création d’emplois permise par l’AfCFTA, ce que Vera Songwe désigne par le terme « gender focus » : les emplois devront inclure les femmes et respecter l’égalité des genres. La zone de libre-échange devrait également stimuler les projets d’infrastructures et les technologies d’information et de communication en Afrique. L’AfCFTA servira également de cadre au développement du e-commerce sur le continent. Globalement, l’accord de libre-échange aura pour objectif de pallier les dysfonctionnements du commerce africain, qui sont notamment une conséquence du fractionnement des économies du continent.