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Compte-rendu de la session plénière du nouveau parlement Européen: 2e séance

Mercredi 3 juillet 2019, matin et début d’après-midi

Sommaire : 

  • Note analytique succincte
  • Discours paraphrasés des candidats 
  • Scrutin
  • Discours paraphrasé de M. Sassoli, nouveau Président du Parlement européen
  • Réaction paraphrasées des Présidents et Présidentes de groupe

9h15 : M. Tajani, président de la législature précédente, réclame le silence, demande aux députés de s’asseoir et déclare que cette séance sera notamment consacrée à l’élection du président. Il présidera l’élection jusqu’à la nomination du nouveau président.

Sont candidats à ce poste : 

  • Mme. Ska Keller (groupe les Verts/ALE)
  • Mme. Sira Rego (groupe Gauche unitaire européenne/gauche verte nordique)
  • M. David Maria Sassoli (groupe APSD (gauche socialiste))
  • M. Yann Zahradil (groupe ECR (conservateurs))

Note analytique succincte :

Absence de candidat PPE en raison du traditionnel « deal » entre Socialistes et Chrétiens-démocrates : chaque législature, les partis s’abstiennent à tour de rôle de présenter un candidat et s’engagent à soutenir celui présenté par l’autre groupe. (Exemple : M. Schulz était socialiste, M. Tajani était chrétien-démocrate, M. Sassoli est socialiste). Ce « deal » explique notamment la faible présence du PPE dans les débats, étant alors associé à l’APSD.

Trois axes majeurs et communs, dégagés par la quasi-totalité des orateurs : 

  • Nous avons besoin d’une action écologique, principalement demandée par les jeunes
  • Il faut renforcer le lien entre le Parlement, les citoyens et la société civile (avec les jeunes, cela se fera justement par cette action écologique)
  • Les citoyens ayant montré leur intérêt pour le Parlement au travers de ces élections, il faut renforcer son rôle au sein des institutions (perspective de la mise en place de l’initiative législative parlementaire, telle que souhaitée et attendue par bon nombre de hauts-fonctionnaires européens ?)

Discours paraphrasés des candidats :

Mme. Keller :

Les électeurs ont envoyé un message pro-européen et anti-extrême droite. Il faut donc renforcer le Parlement européen en tant qu’institution et à ce titre, élire un(e) Président(e) qui représente cette indépendance.  Aujourd’hui, face à la crise climatique et celle des inégalités sociales, nous avons besoin de l’Union européenne. Le Parlement européen doit alors être le lieu de débat des citoyens et a besoin d’être ouvert. Au nom des principes de démocratie, de Droits de l’homme et de l’Etat de droit, l’Union européenne doit promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes, les droits des travailleurs, la transparence et la réduction de son empreinte écologique. Il est important de défendre cette institution qui prône la réunion des pays et des peuples (sujet auquel elle se dit très sensible, elle qui, selon ses dires, fut née derrière le rideau de fer à la frontière germano-polonaise). Le Parlement étant la seule institution directement élue, il doit donc être le chef de fil de cette action. En somme, il s’agit d’augmenter les droits du Parlement européen.

Mme. Rego :

Aujourd’hui, il faut défendre les travailleurs et rester proche des préoccupations des gens. Le Parlement doit être aux côtés des peuples et des travailleurs. A ce titre, il doit s’opposer à l’exploitation des travailleurs et des ressources naturelles. En effet, les politiques néolibérales de l’Union ont causé du chômage et de la précarité, tel que ce fut le cas en Grèce, en Italie et en Espagne – pays qui ont énormément souffert de ces politiques. Par ailleurs, le néo-libéralisme européen a causé une crise écologique et sociale planétaire. Il faut donc créer une Commission sur l’urgence climatique au Parlement. Enfin, le néo-libéralisme a engendré le discours fasciste jusqu’ici au Parlement et ce dernier ne peut pas normaliser ce discours. En effet, il est aujourd’hui important de garantir les droits de ceux qui veulent sauver des vies, à l’instar de Carlota Rackete, contrairement à ce que fait aujourd’hui Matteo Salvini [huées de l’extrême-droite et applaudissements de la gauche et de l’extrême-gauche]. Il est aussi aujourd’hui important de promouvoir le féminisme dans une Europe fraternelle et anti-fasciste, à l’instar de ce qu’ont fait les Républicains espagnols contre le régime franquiste et de ce que font aujourd’hui les marins du Sea Watch. En somme, il faut une Europe de la paix et de la solidarité.

[L’extrême-gauche applaudit franchement, la gauche applaudit de manière éparse, l’extrême-droite hue]

M. Tajani demande aux orateurs de parler plus lentement car les interprètes ont du mal à suivre. Il rappelle aussi l’importance du respect mutuel (en référence aux huées de certains députés).

M. Sassoli :

L’Europe fait aujourd’hui face à des défis qui la menacent. Dans ce contexte, il est important de respecter notre diversité. Le parlement doit donc être autonome pour incarner son rôle primordial : être la « Maison de la démocratie européenne ». Avec une forte participation des jeunes électeurs et 62% de renouvellement de l’hémicycle, nous pouvons considérer que ces élections ont été une réussite. Les électeurs nous ont donc montré qu’ils croient en la démocratie et aux élections libres, et le Parlement doit construire une Europe forte et moderne pour instaurer une confiance mutuelle entre les citoyens et les institutions.  Face au défi climatique, de justice sociale, de croissance, d’emploi, d’égalité des chances, le Parlement doit aussi être moderne, éco-durable et accessible aux citoyens. Ce n’est que de cette manière que le Parlement sera respecté. M. Sassoli dit qu’il sera à l’écoute des parlementaires et qu’il accordera une importance particulière à l’égalité homme-femme, ainsi qu’aux jeunes. En effet, l’Europe, c’est le respect des opinions de chacun et l’ancien appel de Jean Monnet est plus actuel que jamais.

Yann Zahradil :

Avec un siège au Parlement depuis 2004 et la traversée de cinq présidences, M. Zahradil est convaincu qu’il apportera son expérience. Il sait ce qu’un président devrait faire ou pas et ce qu’est réellement un bon président. Un bon président, c’est un président neutre, impartial et qui traite tous les membres avec équité. Dans son tract de candidature, il a montré ce qui lui était cher, tel que la baisse du gaspillage ou l’écoute des citoyens. Aujourd’hui, il est important de recréer un équilibre entre le niveau de l’Union et le niveau national, entre le Conseil, la Commission et le Parlement, entre les PECO et l’Europe occidentale et entre les grands et les petits pays. En tant que seul candidat issu d’un petit pays et qui plus est, un PECO, il saura instaurer cet équilibre. Voter pour lui, c’est choisir la promesse d’un bon Président du Parlement.

Scrutin :

M. Tajani remercie les fonctionnaires, les assistants et les huissiers qui aident à la réalisation de ce travail et souhaite un joyeux anniversaire au Secrétaire général Klauss Welle. Il rappelle également les modalités de l’élection pendant que les huissiers distribuent les bulletins : le Président doit être élu à la majorité des suffrages exprimés et les votes blancs ou nuls ne compteront pas.

9h40 : brouhaha ambiant tandis que les députés se déplacent vers les urnes disposées aux périphéries de l’hémicycle

10h15 : M. Tajani déclare les votes clos et lève la séance

11h14 : reprise de la séance et résultats du premier tour :

  • Mme. Keller : 133 voix
  • Mme. Rego : 42 voix
  • M. Sassoli : 325 voix
  • M. Zahradil : 160 voix
  • (73 votes blancs ou nuls)

Suspension de séance

11h40 : reprise de la séance et votes du second tour

12h : suspension de séance

13h : reprise de la séance et résultats du second tour : 

  • Mme. Keller : 119 voix
  • Mme. Rego : 43 voix
  • M. Sassoli : 345 voix
  • M. Zahradil : 160 voix

M. Sassoli est élu nouveau Président du parlement européen à la majorité absolue des suffrages.

13h05 : M. Tajani quitte la chaire et invite M. Sassoli à prendre sa place.

Discours paraphrasé de M. Sassoli, nouveau Président du Parlement européen :

Sur un ton assuré, virulent, avec parfois certains accents accusateurs

La liberté européenne est le fruit de la justice et de la solidarité. Nous pouvons par exemple nous féliciter qu’aujourd’hui, le Parlement compte 40% de femmes, mais nous pouvons encore aller plus loin. Par exemple, face aux défis du climat, de l’immigration et du chômage des jeunes, il faut agir avec sagesse et audace. Il s’agit de renouer avec l’esprit des pères fondateurs, qui ont mis un terme à la guerre, qui ont mis les nationalismes en échec et qui ont conciliée liberté, égalité et droits de l’homme. Les citoyens ont en effet foi en notre projet et il faut aujourd’hui faire face à ces défis globaux, en relançant l’intégration européenne. Nos valeurs de liberté, de dignité et de solidarité doivent être promues à la fois à l’intérieure de l’Europe, mais aussi à son extérieur. Nous pouvons être fiers de notre diversité. Dès lors, nos valeurs, dont la dignité humaine, ne sauraient être remises en question par les gouvernements. L’identité de l’Europe, c’est en effet l’économie sociale de marché et la protection de l’environnement. Il faut aujourd’hui réaffirmer la convergence de nos territoires, embrasser la révolution numérique et ainsi, concilier progrès et protection. Pour cela, il faut investir dans les technologies propres et écouter les revendications des jeunes, qui ont manifesté jusqu’à devant cette institution. De la même manière, le Parlement doit garantir l’égalité homme-femme. Pour parvenir à ces objectifs, il doit donc mettre en place des règles nouvelles.

Nous partageons tous une histoire commune et la construction européenne n’est pas un accident. Nous avons tous des histoires familiales tragiques liées à la guerre et au sang versé, des plages de Normandie aux ghettos de Varsovie. L’Union européenne est donc née du souhait de fraternité de nos parents. Nous sommes aujourd’hui les enfants de gens, qui ont trouvé un antidote au virus à la dégénérescence du nationalisme. 

Le Parlement doit donc être le garant de l’indépendance des citoyens. Il est par exemple aujourd’hui crucial de réformer le règlement de Dublin, nécessité qui a déjà été approuvée à une large majorité [applaudissements de la gauche, de l’extrême-gauche et des Libéraux]. Les jeunes nous demandent de nous réveiller pour sauver la planète et eux-mêmes, doivent être prêts à encourager le Parlement dans sa réforme climatique. A l’attention des parlementaires pro-Brexit, M. Sassoli dit que le Brexit fait mal à l’Europe mais que cette dernière respecte le choix des citoyens britanniques, et fera preuve de sagesse à ce sujet. 

En somme, le Parlement doit être la « maison de la démocratie européenne ». Il faut de la transparence envers les citoyens et plus de dialogue avec l’administration. Nous développerons l’Europe par le courage ! [Applaudissements de l’assemblée]

Réaction paraphrasées des Présidents et Présidentes de groupe :

11h 24 : M. Sassoli donne la parole aux Présidents de groupe

PPE :

Le Parti populaire européen souhaite plein de succès à M. Sassoli, le félicite et lui promet son soutien.

APSD :

L’Alliance progressiste des socialistes et démocrates félicite M. Sassoli et est honorée de son élection. Elle apportera sa collaboration pour construire une Europe de l’égalité et de la justice. 

RE :

Le groupe Renew Europe félicite  M. Sassoli. Il  est convaincu que ce sera le Parlement, et pas le Conseil, ni la Commission, qui fera évoluer l’Europe. Il dit vouloir mettre fin aux négociations de couloir [moqueries et rires à haute voix  de la gauche et des Verts, tandis que les libéraux applaudissent].

Les Verts/ALE :

Le groupe écologiste travaillera main dans la main pour augmenter les droits des citoyens. Il ne faudra pas abandonner ni lâcher de terrain pour renforcer la démocratie en Europe. Il demande également au nouveau Président que le chef de la Commission soit un Sptizenkandidat, que le Parlement fasse preuve de plus de transparence, que l’on prenne au sérieux les résolutions adoptées contre le harcèlement sexuel au sein du Parlement et que le Président se penche sur le cas d’un député qui n’a pas pu assister à la séance, car son Etat n’a pas communiqué son nom.

Identité et démocratie :

Le groupe Identité et démocratie partage certaines valeurs avec M. Sassoli, notamment en ce qui concerne le Parlement en tant que « maison de la démocratie ». Néanmoins, il espère que le nouveau Président apportera des preuves que tous les groupes politiques seront intégrés de la même manière dans le débat et les fonctions parlementaires, condition essentielle pour que le Parlement puisse être considéré comme une institution démocratique.

CRE :

Le groupe Conservateurs et réformistes félicite le Président malgré leurs divergences politiques réciproques. Il partage toutefois l’idée que le Parlement doit avoir un rôle avancé, mais ne s’accorde pas sur les méthodes pour y parvenir. Les Conservateurs souhaitent en effet mettre fin aux « accords » et renforcer la visibilité des Etats-membres, afin de permettre un rééquilibrage à ce niveau-là.

GUE/GVN :

Le groupe de la Gauche unitaire européenne/gauche verte nordique félicite le nouveau Président. Il souhaite défendre les droits des travailleurs et travailleuses et prie M. Sassoli de rendre le travail parlementaire  plus transparent afin de garantir les droits de chaque député. C’est à cette seule condition qu’ils pourront mener des projets communs. 

  • David ANTONI, 3 juillet 2019, après-midi