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Rapport de la session plénière du nouveau parlement Européen: 3e séance

Institutions présentes : 

  • Parlement européen : représenté par son assemblée
  • Conseil européen : représenté par M. Donald Tusk, président du Conseil européen
  • Commission européenne : représentée par M. Maroš Šefčovič, Vice-président de la Commission

La seconde moitié de la matinée du jeudi 4 septembre a été consacrée aux débats sur les conclusions du Conseil européen des 20 et 21 juin 2019. Néanmoins, M. Tusk, le président du Conseil européen, n’a pas rappelé ces conclusions à l’oral, précisant qu’elles étaient déjà publiées et donc, connues de tous. A contrario, dans le contexte de la nomination et de l’approbation parlementaire de la nouvelle Commission européenne, le débat a surtout été orienté sur le choix des candidats à la Commission. Par ailleurs, l’après-midi et la soirée de la veille ainsi que la première partie de la matinée de ce jour ayant été consacrées à l’élection des postes parlementaires importants, ces questions de nomination parlementaire ont aussi occupé une grande partie des discussions. Enfin, les Parlementaires se sont aussi interpellés sur des questions plus générales telles que les relations internationales, la gestion des flux migratoires, les problématiques écologiques, etc. 

  1. Un conflit entre le Parlement et le Conseil européen

10h39 : M. Tusk commence son discours à l’invitation de M. Sassoli, nouveau président du Parlement. Après avoir rappelé que le Parlement était élu, il mentionne que le Conseil européen n’en bénéficie pas moins également d’une autre légitimité démocratique. Pour cela, il estime qu’il n’est pas lieu d’y avoir un quelconque conflit avec le Parlement et est certain qu’ils pourront coopérer ensemble. Par ailleurs, il se félicite de la parité à la tête de deux institutions importantes de l’Union. En outre, il se félicite aussi de la coalition avec les Verts et encourage Mme. Von der Leyen à choisir des Ecologistes en tant que Commissaires. Enfin, il rappelle que l’équilibre géographique entre les différents pays lui tient à cœur. Ces déclarations ont provoqué de vives oppositions des Parlementaires, lors des discours des Présidents de groupe ou des prises de parole durant le temps d’expression libre. 

  1. 1.1.La question de la transparence 

La première critique adressée du Parlement au Conseil européen, est celle du manque de transparence. En effet, tous les groupes ont unanimement dénoncé des « négociations à huit clos ». Le PPE a sans aucun doute été le plus virulent et ses orateurs sont allés jusqu’à ouvertement refuser d’accorder leurs félicitations à M. Tusk pour son mandat. Son orateur a explicitement dit que M. Tusk « avait de la chance que l’article 7 ne puisse pas s’appliquer au Conseil européen ». La GUE/GVN a aussi largement rejoint l’orientation du PPE en qualifiant ce manque de transparence de « vrai scandale » qui est a eu un « impact désastreux » sur la démocratie européenne. Le groupe RE s’est adjoint à ce souhait de plus de transparence, notamment en ce qui concerne l’attribution des postes à responsabilité de l’Union.

  1. 1.2.L’épineuse question des Spitzenkandidat à la Commission

Selon la plupart des groupes (dont RE), ce sont les Spitzenkandidat qui auraient dû être nommés, ou du moins choisis, à la présidence de la Commission.  Ici encore, le PPE, suivit de l’APSD, a estimé que le respect des citoyens européens aurait imposé de propose M. Weber ou M. Timmermans à la tête de la Commission. Ainsi, l’orateur du PPE  a déclaré à l’attention de M. Tusk, que « vous avez ouvert un conflit pour savoir qui dirigeait l’Europe, nous pensons que c’est le peuple qui dirige ». Néanmoins, si le PPE déplore le manque de consultation du Parlement par le Conseil européen, il a toutefois affirmé qu’il soutiendra la candidature de Mme. Von der Leyen car c’est une Chrétienne démocrate, qui est donc issue du parti qui a « gagné les élections ». En revanche, l’APSD a estimé que M. Timmermans représentait le véritable choix du peuple européen, et déplore à ce titre le refus de M. Tusk de prendre en compte sa candidature. Ainsi, l’APSD déclare qu’elle ne soutiendra pas un candidat qui ne proposera pas de réforme économique, sociale, ou qui réponde à l’urgence climatique.

En revanche, le groupe ECR s’est distingué en s’opposant à cette idée de nommer des Spitzenkandidat à la Commission. Il a affirmé son amour de la « règle » et a rappelé que rien dans les Traités ne prévoyait une telle disposition. Au contraire, selon lui, M. Timmerman n’aurait pas été le candidat du peuple mais celui de « l’establishment de gauche ». Toutefois, le respect des « règles » aurait également interdit au Conseil européen de proposer la cheffe de la Commission. Ce ne sont donc ni le Parlement, ni le Conseil européen, mais directement les Etats-membres qui devraient proposer des candidats, sans passer par aucun intermédiaire.

  1. Une convergence stratégique entre le Parlement et la Commission

Malgré l’opposition claire et vigoureuse entre le Parlement et le Conseil européen, il semblerait que le parlement partage une vision plus commune avec la Commission. En effet, tous deux ont soulevé les même enjeux et objectifs, même si certains groupes divergent sur l’ambition de ces projets. 

  1. 2.1.Un consensus sur la question chypriote

La question de la crise chypriote a été abordée par plusieurs orateurs ce matin et semble faire l’unanimité. La Commission, comme les Parlementaires, condamnent la Turquie et ont apporté tout leur soutien à la République de Chypre du Sud.

Ce sont ainsi M. Šefčovič et M. Avrides (APSD) qui ont par exemple exprimé leur total soutien au peuple chypriote. M. Avrides a notamment déclaré que « nous sommes tous Chypriotes ».

Digression : la politique internationale de la Commission

Durant son discours, M. Šefčovič  a abordé trois points de politique étrangère : la crise chypriote, l’élargissement aux Balkans occidentaux et la crise Ukrainienne. 

  • Sur la crise chypriote : il a affirmé le soutien « sans réserve » de la commission à la république de Chypre contre les forages turcs (Cf. note n°9)
  • Sur l’élargissement aux Balkans occidentaux : il a rappelé qu’il y avait une perspective européenne mais qu’également, l’Albanie et la Macédoine du Nord devaient maintenir leurs efforts pendant l’évaluation, afin de garantir l’Etat de droit
  • Sur la crise ukrainienne : il a apporté son soutien à l’Ukraine et a rappelé l’engagement de la Commission pour le respect des accords de Minsk, ainsi que le suivi de la construction du transit gazier qui passera par l’Urkaine.
  1. 2.2.Un semi-consensus sur le climat

Si la Commission a rappelé son engagement pour le respect des Accords de Paris et la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40% d’ici à 2030, certains groupes parlementaires souhaitent promouvoir des objectifs plus ambitieux. C’est notamment le cas des Verts, des Non-inscrits, de l’APSD et de la GUE/GVN.

Les Verts ont parlé d’une « triple crise » dont l’écologie faisait partie, aux côtés de la crise sociale et démocratique. Les non-inscrits ont eux, parlé d’une trahison du TFUE par l’autorisation du glyphosate qui ne serait pas conforme au principe de précaution. L’APSD a, quant à elle, estimé que le cadre financier pluriannuel proposé par la Commission n’était pas assez ambitieux pour respecter les Accords de Paris.

  1. Un manque de collégialité parlementaire 

Au-delà des relations interinstitutionnelle, les groupes parlementaires se sont écharpés sur des questions politiques inter-groupe. Certains ont appelé à une grande coalition parlementaire sur certaines questions, d’autres ont déploré une exclusion de certains groupes.

  1. 3.1.Le souhait des Verts d’une grande coalition pour s’affirmer face au Conseil européen

Les Vert/ALE ont exprimé un Mea Culpa institutionnel en rejetant la faute de la non-affirmation du Parlement face au Conseil européen, sur lui-même. En effet, selon eux, face à la « triple crise » (Cf. ultra) à laquelle l’Union européenne fait face, le Parlement, avec une « majorité large et sable », aurait pu forcer la main au Conseil européen tant sur  les questions écologiques et sociales que sur la nomination des Commissaires européens. Or, ils considèrent que cette « majorité » n’a pas été effective. En d’autres termes, ils pensent que si le Parlement sort affaibli de cette mandature, cela sera de sa propre faute. 

A contrario, avec une « majorité large et stable » et donc, une imposition face au Conseil européen, le Parlement aurait justement pu montrer qu’il était l’expression de la volonté des citoyens européens. Il aurait ainsi pu renouveler la foi en l’Europe en bâtissant  un projet fondé sur la dignité des êtres humains et la préservation des ressources naturelles.

  1. 3.2.Une droite dure qui se sent discriminée

Les groupes ID et CRE ont exprimé leur colère face aux nominations des postes dans les commissions parlementaires. Ils s’estiment en effet discriminés par les autres groupes, qui auraient « écarté 20% des Parlementaires ». 

A ce titre, le groupe ID a dénoncé une hypocrisie du Parlement. Cette hypocrisie se manifesterait d’une part, dans le non-respect de la démocratie par cette apparente volonté de discrimination et d’autre part, dans la possible approbation du collège des Commissaires par le Parlement. Le groupe ID estime qu’en effet, au regard de toutes les invectives qui ont été adressées à Donald Tusk, le Parlement serait hypocrite de tout de même d’accorder sa confiance à cette Commission. 

Points divers :

Groupe ID : 

  • Les institutions européennes offrent un spectacle indigne en faisant de la querelle des postes à la Commission, un sujet aussi important : c’est incompréhensible pour les citoyens
  • Souhaite une Europe qui régule les flux migratoires pour assurer la sécurité de ses citoyens
  • Le budget pluriannuel proposé par la Commission est un échec car il ne prend pas en compte cette dimension sécuritaire

Groupe Non-inscrits :

  • Il faut parler des « vrais problèmes » des citoyens

Groupe RE : 

  • Il faut une conférence paneuropéenne qui durera deux ans à deux ans et demi pour renouveler le projet européen. Elle impliquerait la société civile au plus haut point
  • Il faut un mécanisme de sanction plus efficace car le respect des droits humains n’est pas négociable

Groupe APSD : 

  • L’Europe n’a pas atteint ses objectifs en matière de baisse de la pauvreté
  • Les citoyens attendent la défense des Droits des femmes (référence aux féminicides), des LGBTI, etc.
  • Il faut une réforme de l’Union monétaire qui renforce la zone euro

Commission européenne : 

  • Se félicite de la réussite de l’Union bancaire adoptée post-crise de 2008

David ANTONI, 4 juillet 2019, après-midi