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Ethiopie : situation toujours préoccupante

L’Organisation des jeunes pour l’Union européenne et africaine a été sollicitée par les jeunes pour se saisir la situation dramatique qui a cours en ce moment en Ethiopie. Voici notre plaidoyer. 

L’Éthiopie est confrontée depuis quatre mois à une crise politique et humanitaire. Le 4 novembre 2020, le prix Nobel de la paix 2019, Abiy Ahmed, envoyé une offensive militaire contre les autorités dissidentes du Tigré, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Le 28 novembre 2020, le Premier ministre éthiopien annonçait dans un communiqué que l’armée avait réussi à pénétrer dans la capitale régionale, Mekele, « sans que d’innocents civils soient ciblés ». Par la suite, l’Organisation des Nations-Unies indiquée qu’une « crise humanitaire à grande échelle» se développait à la frontière avec le Soudan ; propos relayé également par L’ONG Amnesty International, qui craignait des « crimes de guerre » après le massacre de civils dans la région nord du pays. 

Divisée en plusieurs régions, l’Éthiopie est un état fédéral d’Afrique. La région du Tigré, située dans le nord du pays, est considérée comme l’une des plus puissantes. À la tête de cette région, le Front de libération des Peuples du Tigré (TPLF) domine la vie politique éthiopienne depuis une trentaine d’années. Arrivé en 2018 au pouvoir, Abiy Ahmed, originaire de l’ethnie des Oromos (considéré comme la plus nombreuse du pays), avait pour objectif de rééquilibrer le pouvoir entre les forces ethniques en Éthiopie. Mais depuis son accès au pouvoir, les dirigeants tigréens se plaignent d’avoir été progressivement écartés à la faveur de procès pour corruption ou de remaniements de l’appareil sécuritaire. En septembre dernier, le Tigré décide d’organiser ses propres élections, défiant le gouvernement qui avait reporté tous les scrutins en raison de la crise sanitaire. Depuis octobre 2020, un bras de fer perdure entre les parlementaires et le TPLF. Le leader du TPLF, Debretsion Gebremichael, déclaré à Reuters dans un message que Mekele subissait un « bombardement lourd », en indiquant que les forces gouvernementales avaient commencé une opération pour contrôler la ville. Dans une autre annonce du TPLF, relayée par l’AFP, le groupe armé exhorte que « la communauté internationale a condamné les attaques d’artillerie et d’avions de guerre et les massacres qui sont commis ». Dans cette déclaration, une accusation été également porté contre le gouvernement érythréen pour implication dans l’attaque de Mekele. Un porte-parole du Premier ministre Abiy Ahmed s’est contenté de déclarer que les forces éthiopiennes ne « bombarderaient » pas les zones civiles.  

La situation ne fait que de se dégénérer dans la région nord-éthiopienne. Aujourd’hui, plus de 20 000 réfugiés sont portés disparus après la destruction de deux camps par les confrontations armées dans la région. Les réfugiés, dont la plupart sont originaires de l’Érythrée voisine, ont fui les abris des Hitsats et de Shimelban, détruits lors des combats. En janvier dernier, des images satellites ont montré la destruction des camps abritant des milliers d’exilés Érythréens dans la région. Environ 3 000 personnes se seraient rendues dans un autre camp de Mai-Aini, auquel l’ONU a accès, selon Filippo Grandi, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les migrants. De nombreux réfugiés « ont été pris entre deux feux, enlevés et contraints de retourner en Érythrée sous la contrainte des forces érythréennes », d’après des témoignages recueillis par Grandi. Filippo Grandi appelé le gouvernement éthiopien à faire davantage pour protéger les civils contre les conflits. « Bien qu’il ne m’appartienne pas de porter un jugement plus politique, j’ai la responsabilité de dire au gouvernement d’aider à minimiser et éliminer l’impact de cette situation sur les civils. […] Un soutien urgent est nécessaire pour éviter que la situation ne s’aggrave. Notre principale priorité est d’apporter une aide et de protéger les civils. », déclare Filippo Grandi.  

Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, se dit « sérieusement préoccupé par la situation humanitaire » dans la région du Tigré. « Il faut continuer à prendre des mesures urgentes pour atténuer les conséquences humanitaires » de la crise « et étendre les protections nécessaires aux personnes en danger », annonce le porte-parole du chef de l’ONU dans une déclaration. M. Guterres estime également que le partenariat entre le gouvernement éthiopien et l’ONU est indispensable pour alléger les souffrances des populations civiles. Lundi, l’ONU s’inquiète des « contraintes d’accès dues au conflit en cours et à la bureaucratie administrative ». L’accès aux services essentiels, aux moyens de subsistance et l’argent liquide reste limité dans une grande partie de la région. La faim augmente et le système de santé s’effondre. Selon l’ONU, l’accès est particulièrement limité dans les zones rurales, où 80% de la population du Tigré vivait avant le début du conflit.  

Par ailleurs, le chef de l’ONU félicite l’engagement du gouvernement aux récentes visites en Éthiopie de Gilles Michaud, Sous-Secrétaire général de l’ONU à la sécurité, de David Beasleys, Directeur général du Programme alimentaire mondial et de Filipo Grandi, Haut-Commissaire de l’ONU pour les réfugiés. Des accords sont pris, conformément à l’appel du Secrétaire général au gouvernement, pour un accès humanitaire durable, impartial et sans entrave aux zones et aux personnes touchées. Le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrel, adressé un message aux autorités éthiopiennes : « nous sommes prêts à aider, mais à défaut d’un accès des acteurs humanitaires, l’UE ne peut débourser le budget prévu pour soutenir le gouvernement éthiopien ».  

L’Union européenne dit recevoir des informations concordantes faisant état de violences ethniques ciblées, de meurtres, de pillages de masse, de viols, de retours forcés de réfugiés et de possibles crimes de guerre. Un bilan recense plus de deux millions de déplacées à l’intérieur du pays. Et, si les populations ont cruellement besoin d’aide, l’accès à la région touchée reste limité, rendant difficile l’acheminement de l’aide humanitaire. À la suite d’un entretien entre Josep Borrel, le vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères d’Éthiopie, Demeke Mekonnen, l’Union européenne rappelé qu’elle a été et restera un partenaire fiable de l’Éthiopie. 

Afin d’aider l’Éthiopie à faire face à la pandémie du COVID-19, l’Union européenne a mobilisé 487 millions d’euros pour soutenir le plan de préparation et d’intervention en matière de santé du gouvernement. Cependant, Josep Borrel a également souligné que, dans les circonstances actuelles, en particulier l’absence d’accès humanitaire aux zones de conflit, l’Union européenne n’a pas d’autre choix que de reporter le versement de 88 millions d’euros prévus à titre d’appui budgétaire. Le chef de la commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, appelé à une « cessation immédiate des hostilités » au Tigré. Il encourage les parties à dialoguer pour trouver une solution pacifique dans l’intérêt de l’Éthiopie.  

Au côté des organisations internationales, l’Organisation des jeunes pour l’Union européenne et africaine appelle également à une résolution pacifique du conflit. Les jeunes de nos deux continents ne peuvent rester passifs face à des crises qui interrogent notre humanité. Que les victimes soient jeunes ou plus âgées, c’est à toutes les générations de prendre la responsabilité de ces crises. Nous, les jeunes, appelons à ce travail intergénérationnel. Les jeunes doivent être associés aux processus de résolution des crises. Ils sont l’avenir de nos continents ainsi qu’une source d’inspiration pour proposer des solutions qui dépassent leur simple classe d’âge. 

Christopher Manzambi  

Sources
www.eeas.europa.eu  
www.voaafrique.com
www.news.un.org  
www.jeuneafrique.com