Le 4 novembre 2019, le think tank « Euro creative » s’est fait l’écho d’une déclaration de M. l’Ambassadeur de France en Serbie, Jean-Louis Falconi, selon laquelle la France œuvrerait toujours à l’adhésion des Balkans occidentaux à l’Union européenne (UE). Néanmoins, cette déclaration semble en plusieurs points, contradictoire avec de nombreux autres éléments de la diplomatie française.
Tout d’abord et de manière assez évidente, la France s’est prononcée contre l’adhésion de ces pays, lors des récents débats au sein de l’UE y étant relatifs. Par ailleurs, d’autres déclarations préalables de certains représentants de l’Etat, ont confirmé cette position. Ainsi, le 14 juin 2019, Mme Amélie de Montchalin, Secrétaire d’État chargée des affaires européennes, avait déclaré à l’occasion d’une réunion publique à Strasbourg, que M. le Président de la République, Emmanuel Macron, préférait d’autres solutions que l’élargissement en ce qui retourne des Balkans occidentaux. De même, début juillet, juste avant sa visite en Serbie, M. Emmanuel Macron se serait « opposé à toute forme d’élargissement » vers ce pays.
Enfin, l’ambiguïté de la position française s’est particulièrement faite ressentir lors du discours de M. Macron au G7, le 27 août 2019. En demandant à l’Europe de « réinvestir géographiquement les Balkans occidentaux […] pour ne pas laisser des puissances non européennes faire le jeu à notre place », Emmanuel Macron déclare certes qu’il est conscient des jeux d’influence qui ont court dans cette région (la Russie aurait par exemple proposé à l’Albanie d’intégrer l’Union économique eurasienne après la « non-décision européenne » la concernant), mais ne prend pas pour autant clairement position pour ou contre l’élargissement de l’UE à ces pays.
Ainsi, une opposition nette se dessine entre l’intégration des Balkans au projet européen soit par l’élargissement, soit par d’autres formes de coopération (telles que des investissements institutionnels, des coopérations économiques, etc.). La position très ambiguë de la France sur cette question n’est donc pas pour apaiser les tensions entre l’Union européenne et ces pays, dont les relations ont été excitées par le refus de l’UE d’enclencher pour de bon le processus d’adhésion, après pourtant des années de discussions.
L’Organisation des jeunes pour l’Union européenne et Africaine met en garde les dirigeants européens sur le risque d’un scénario « à la Turque », dans lequel les pays balkaniques se jetteraient dans une hostilité à l’UE à force de promesses perçues comme non-accomplies. Pour autant, nous notons et sommes conscients des différences socio-économiques et politiques entre l’UE et les pays des Balkans, qui peuvent freiner l’adhésion. L’Union européenne doit donc habilement arbitrer entre le risque de voir les Balkans occidentaux devenir le pré-carré d’autres puissances et celui d’intégrer des pays qui pourraient ne pas être prêt à supporter les implications politico-économiques d’une adhésion à l’UE.
L’Organisation des jeunes pour l’Union européenne et africaine relève la difficulté de résoudre ce dilemme. Il est donc plus question de lancer un appel à alerte et à agir, que de blâmer un quelconque dirigeant, Etat ou organisation internationale qui se trouverait en porte-à-faux devant une problématique aussi complexe.
2 Voir notre compte-rendu de la réunion publique de Mme Amélie de Montchalin à la Bibliothèque nationale universitaire de Strabourg : https://jeunesueua.org/compte-rendu-de-la-reunion-publique-avec-mme-amelie-de-montchalin-secretaire-detat-aux-affaires-europeennes/
5 Cf. également « Euro creative » : http://eurocreative.fr/?p=480
6 Voir la conclusion de notre dernier rapport sur la Politique européenne de sécurité commune : https://jeunesueua.org/la-politique-etrangere-de-securite-commune-au-parlement-europeen-quand-strategie-et-ideologie-se-confrontent-et-se-conjuguent/
David Antoni,
Chargé des affaires européennes,
Organisation des jeunes pour l’Union européenne et africaine